Ovaires et contre tout

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Chapitre 3 : Entre peur du regret et FOMO

Chapitre 3 : Entre peur du regret et FOMO

Entre la crainte de regretter d'avoir un enfant et celle de regretter de ne pas en avoir, j’ai l’impression de marcher sur un fil tendu au dessus d’un volcan, en appui sur le bout des gros orteils.

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Anaïs Richardin
avr. 21, 2025
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Chapitre 3 : Entre peur du regret et FOMO
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J’ai envie de vous parler de mon petit métronome interne. Attention, pas de cette foutue horloge biologique (on y reviendra plus tard) mais bien de cette petite aiguille, qui à certains moments se fait plus piquante qu’a d’autres et qui oscille entre :

Si je passais à côté de quelque chose d'incroyable ?

et

Si je me retrouvais piégée dans une vie qui ne me convient pas ?

J’ai l’impression d’être coupée en deux. Chaque pied sur le bord d’une rive et au milieu, un gouffre au fond duquel coule un fleuve tourmenté et instable. Si j'avais trouvé un peu de légèreté et de sérénité ces dernières années en me disant que je ne serai jamais mère, j'ai renoué depuis quelques mois avec l'inconfort de cette pointe qui s'enfonce dans mon crâne pour me faire gamberger chaque putain de jour sur ce que je vais devenir. Mère ou pas mère ? C’est un tison dont le seul rôle est de remuer les braises qui brûlent sans relâche au fond de mon cerveau (je le répète pour celles qui viendraient d’arriver : on ne fait pas dans la mesure ici, j’adore l’art de la nuance dans la vraie vie, mais quand j’écris je suis une drama queen).

Le FOMO de la procréation

D’un côté l’aiguille penche donc vers le “mais si c’était la chose la plus folle de ta vie ?”. Je me rappelle qu’un jour une amie, qui a deux enfants, m’a dit que “devenir mère est d’une puissance sans nom, j’espère sincèrement que tu vas l’expérimenter parce que tu n’as pas idée de ce qui t’attend et de la personne que tu vas rencontrer”. Je n’ai plus la citation exacte (mémoire de Dory bonjour) mais je me souviens de la pointe de colère, ou d’amertume peut-être, que j’ai ressenti sur le moment. J’avais l’impression qu’elle me disait que je ne serai jamais entière, jamais complète, jamais une vraie femme si je ne passais pas la case “maternité” du plateau du jeu de la vie. Et puis la colère s’est muée en autre chose. Et si elle avait raison ? Et si je me privais de l’expérience la plus transformatrice qui soit ?

C’est là qu’est apparu le FOMO (Fear Of Missing Out), soit la peur de rater quelque chose. Cet acronyme, né en même temps que les réseaux sociaux (hasard ? Je ne crois pas), décrit l’anxiété qui nous étreint quand on pense passer à côté de quelque chose. Comme quand on décide de ne pas aller à cette soirée qui ne nous dit pas tant que ça mais qu’une petite ritournelle commence à se faire entendre : “Oui mais si je rencontrais quelqu’un à cette soirée ?”, “S’il s’y passait un truc incroyable que jamais plus je ne revivrais ?”, “Si j’y trouvais un ticket d’or qui me permettrait de pouvoir m’acheter un terrain avec une source et une petite maison mignonnette avec une cheminée ?”.

Aujourd’hui, je vis la même chose mais avec le fait d’avoir un enfant et de devenir mère et j’expérimente donc, un jour sur deux, le FOMO maternel. Pour moi c’est la forme la plus intense de cette angoisse de louper le truc du siècle.

Je ne craque pas particulièrement devant les bébés, mais chaque fois que je vois un petit humain haut comme trois poires ou que j'aperçois un ventre tendu parce qu'en train de fabriquer un autre être, je ne peux m'empêcher de me poser la question : et si je passais à côté de quelque chose ?

J’essaie alors de visualiser une autre version de moi, à la place de cette personne enceinte jusqu’aux paupières, en train d’essayer de calmer ce môme qui braille ou faisant gouzui gouzui à un petit corps tout chaud, collé contre mon grand corps tout chaud. Et je me demande ce que ça ferait à mon corps, et à mon coeur, de sentir la vie en moi, puis de sentir celui ou celle que j’aurais passé neuf mois à fabriquer s’extirper de son cocon pour découvrir le monde, accroché à mon sein, à ma main et puis un jour, plus besoin. J’arrive parfaitement à me projeter dans certaines situations mais beaucoup moins dans d’autres et au final, la réponse n’est jamais très claire.

Pompon sur la Garonne, il y a quelques temps je suis tombée sur un épisode de Sophie-Marie Larrouy -touchaàtouiste qui est également créatrice et productrice de podcasts-, dans lequel elle explique comment elle a eu une révélation à la naissance de son fils, alors qu’elle n’avait jamais vraiment eu de projet bébé.

“Quand j’ai eu mon fils sur moi, je me suis dit ah d’accord, je suis complète maintenant, c’est lui qui me manquait, et quand on est le cul entre deux chaises tout le temps, c’est assez confortable de ressentir ça”

J’avoue que ce passage a fait tournoyer la pointe un peu plus brutalement et a allumé un brasero géant. Moi qui ai toujours porté mon besoin de solitude et d’indépendance comme un étendard en mode “je suis grande, je suis forte, je n’ai besoin de personne, surtout pas de quiconque pour me “compléter””, j’ai réalisé que peut-être il manquait une pièce à mon puzzle. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut forcément la trouver, c’est joli aussi un puzzle de 12 000 pièces auquel il manque un coin, ou un petit bout de bleu dans le ciel. J’ai accepté qu’il y avait une part de moi à laquelle je n’aurai probablement pas accès si je ne deviens pas mère. Et qu’à l’inverse, il y a aussi une part de moi qui ne pourra pas se déployer si je remplis chaque interstice de ma vie par le soin constant à apporter à un enfant. Alors je fais quoi de tout ça ? La suite au prochain épisode.

Non je déconne, c’est parti pour l’anti-thèse.

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